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Fin de mi-novembre 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Semaine loin des montagnes aux abords et au bord du grand lac du Der. Météo fraîche voir froide et puis aussi humide. De froid mêlé d’humide, ce matin-là tout est blanc, une couleur uniforme qui gomme les souvenirs, le vif voire le chaud des couleurs de l’automne. Du blanc comme du crépi, un enduit frais posé, comme vingt ans de poussière déposés en une nuit, peinture avec texture qui joue sur l’épaisseur autant que sur la teinte. Alors les choses toutes fines quasiment invisibles passent dans le visible, une toile d’araignée tendue sur une clôture ou les longs filaments des pompons de l’été en haut des graminées.
Les humains se camouflent, ressortent gants et bonnets en plus des grosses vestes, la tête dans les épaules pour marcher sans flâner, sans regarder autour, surtout sans lever la tête, sans regarder en l’air, sans jamais prendre le risque de permettre le passage à une goutte, un flocon ou l’air froid du dehors vers la chaleur douillette qu’ils ont su préserver dans leurs cols remontés. Du côté des oiseaux on fait bouffer les plumes, on compte sur l’épaisseur pour repousser l’hiver. D’autres préfèrent partir, ils reviendront plus tard. Sans bagages, sans trompettes, ils emmènent seulement leur connaissance si fine de la géographie, du climat, des recoins où il reste un peu de place pour vivre dans ses plumes. Dans le monde des oiseaux, on dira migration, non pas émigration ou bien immigration, simplement migration, phénomène naturel qui consiste à aller là où on vivra mieux, mot exempt des préfixes réservés aux humains devenus sédentaires pour qui la migration n’a plus rien de l’évidence, du parcours naturel.
Sur le lac, dans les champs ou en de larges V, les grues sont de passage. Animaux imposants d’une grande élégance. Tout en nuances de gris, long cou et longues pattes, leur vol est lent et sûr, maîtrise et expertise comme une seconde nature. On les reconnait vite même dans ce coin de la terre qui n’est pas familier où on découvre tout, en gros traits sans finesse par manque d’habitude pour distinguer le subtil, le détail d’intérêt derrière la carte postale. Alors, parler des grues et laisser de côté l’arbre habillé de lierre et décoré de gui qui lui ne bouge pas, mais impose pourtant sa majesté au champs à qui il vient donner la dimension du haut dans une campagne plate, comme l’accent sur la lettre vient changer le sens du mot