Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Retour aux habitudes pour ce qui est du lieu, de l’endroit d’où j’écris mes étonnements de la semaine. Retour aussi aux plantes qu’on sait retrouver là, celles dont on surveille la croissance, le dépli avec l’impatience de la gourmandise, en tremblant dès qu’arrivent le moindre changement de temps et de température, le moindre souffle de vent qui soufflerait trop fort, un insecte qui pourrait endommager l’avenir, compromettre la récolte, mettre le ver dans le fruit. Vie d’angoisse que celle de qui guette, surveille et attend en tremblant tout ce qui se passe sur l’arbre, bourgeons, fleurs enfin fruits, de tout petit à moyen avant d’être adultes, parfois gros, enfin mûrs. Des poires cette année ?
Retour aux habitudes aussi par le contraste, juste quelques jours d’absence et on regarde l’endroit sous un jour différent. Étant toujours sur place, on suit trop les changements pour les voir comme changements, à peine évolution, petits ajustements, progression attendue qui ne fera pas surprise. Comme les feuilles des arbres qui poussent, qui grandissent, s’épaississent, qui construisent le sombre qui nous donnera l’ombre pour survivre à l’été, ses chaleurs, ses lumières, trop fortes pour nos yeux. Mais œuvre du changement ou encore du contraste, le sous-bois fait maintenant l’effet d’un autre monde, de mystères, de secrets, un monde différent, car d’une autre lumière, univers où la vue ne sera plus maîtresse.
C’est au pays des plantes que la vue est précieuse, pour se laisser attirer du coin d’un œil distrait par une couleur qui tranche sur le vert tout autour, se laisser captiver comme serait alléché un insecte dont la vie est liée au pollen autant que celle des fleurs, et plus des plantes à fleurs. Alors, y regarder, mais y regarder de près et compter les pétales, en observer le cœur, parfois tourner la tête, y voir des symétries, des formes, des mécanismes. Et des airs de famille. Familles aux noms latins qui rassemblent la rose, le pommier et la fraise, ou encore les pois chiches, les genêts, la réglisse ou bien le palissandre, pour nous dire de ne pas se laisser égarer par quelques différences et qu’un air de famille ne s’efface pas d’un souffle.
Au chapitre du souffle, on arrive vite au vent, comme souffle incontournable. Léger, il est discret et laissera bien souvent nos oreilles au repos, mais nos yeux le suivront par les mouvements des feuilles, des épis qui font vagues chez les frêles graminées, si bien qu’on oubliera jusqu’à la fin de l’été que derrière le rideau, l’écran des feuilles des arbres se cache un paysage qu’on aura oublié, captivés par la danse des feuilles dans le vent, chorégraphies changeantes en fonction des espèces, de la forme des feuilles, leur accroche sur les branches ou le long d’une tige. Elles se laissent bercer et par leurs doux mouvements, elles nous appellent, nous happent, nous envoûtent, nous captivent. Les feuilles nous ensorcellent.
Une fois ensorcelés, il nous faut pourtant peu pour quitter le spectacle, nous autres, humains volages, il suffit bien souvent de la présence d’un insecte qui agace de ses pattes posées sur notre peau ou du bruit de ses ailes qui piétine l’attention que l’on avait placée dans le mouvement des feuilles. Alors on y revient, mais l’instant est passé, comme on a beau revenir à la branche opportune où l’on a vu l’oiseau, où on l’a observé, où on a eu le temps de bien le reconnaître, de lui donner un nom. Après la distraction, l’oiseau s’est envolé, comme souvent l’idée de ce qu’on voulait écrire pour terminer un texte d’une façon magistrale…



oui l’inquiétude du mûrissement du fruit, de la récolte… ce que tu m’as dit un jour, que tu ne te souciais que de ce qui apporte à manger (tu dirais « becqueter » sans doute dans ton franc parler…), et non pas de « ce qui fait joli »
et pourtant tout cohabite, dans le fleuri aussi on est dans le monde infini des plantes et pour ma part j’ai besoin que la beauté de la fleur se mêle à l’espoir de récolte du légume, de la salade, de mon haricot qui lui aussi va fleurir
tu contemples jusqu’à l’ensorcèlement et là je te rejoins pleinement
(très beau ta série de saison…)
Merci, et tu as bien deviné, admiration pour les fleurs aussi, j’avoue, mais mon stock de temps pour les soins au jardin étant limité, je me suis spécialisée 😉
Me réjouis toujours de voir les photos de chez toi !