Archives mensuelles : août 2025

Fin de mi-août 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

C’est la fin du trop chaud, retour au plus tranquille, à quelques gouttes de pluie, à des lumières plus douces qui nous laissent à nouveau ouvrir les yeux en grand. Voir revenir les nuages se poser sur les pentes, montagnes ennuagées, couvertes de moutons blancs qui font lire autrement l’autre côté de la vallée. Fond clair pour dessiner en sombre les arbres qui vivent là-haut, sur les crêtes des bosses posées du premier plan, d’habitude estompées par les arbres de derrière.
Un peu d’eau et de frais, encore un peu de vert et quelques fleurs éparses qui tentent leur chance quand même, indifférentes et fières parmi celles qui n’ont pas su résister au chaud et se laissent doucement attraper par l’automne et le jaune, annonciateur de brun, de rouille, d’humus, de terre. D’autres pensent au printemps, le prochain qui viendra et laissent tomber leurs feuilles pour bâtir des bourgeons. Une sorte d’aspiration au calme et au repos après la frénésie et les peines de l’été pour résister au sec. Certains arbres ont déjà abandonné le combat, pommes déjà tombées et noisettes à terre quand elles sont encore vertes, alors juste hâter les signes de l’automne pour ne pas compromettre les saisons à venir.
Du côté des lumières, les jours se font plus courts et les rayons de soleil se penchent pour aller voir jusque dans les maisons. Mesurer les saisons à l’avancée du jour sur les lames du parquet, un peu comme si l’été cherchait le meilleur endroit pour venir se reposer durant les mois d’hiver.
Du côté des insectes, les airs sont encore pleins de divers vrombissements, peut-être un peu plus tranquilles maintenant que les oiseaux s’occupent de tous les fruits qu’ils dévorent avidement nous laissant des figues creuses et des pommes trouées en échange de leurs vols silencieux et alertes.
Alors, se préparer à recouvrir de manches nos bras si longtemps nus et à voir le soleil dans le jaune des feuilles qui virevoltent puis se reposent au sol

Mi-août 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Semaine de chaleur, de forte chaleur, de canicule. Le grand chaud excessif, tout comme son opposé, le grand froid excessif, nous pousse à l’intérieur, nous pousse à nous cacher, nous camoufler, nous soustraire au-dehors, à laisser seuls au loin ceux qui ne peuvent se mouvoir pour aller chercher l’ombre. Les arbres sont de ceux-là, plantés, comme toutes les plantes et qui ne peuvent quitter le lieu de leurs racines. Eux qui nous font de l’ombre ne peuvent en profiter que venant de leurs aînés, qui eux sont condamnés à rester tête nue sous le soleil de plomb. Pour certains cette épreuve a hâté la venue du jaunissement des feuilles. Beaucoup ont sur la tête, en fonction de leur espèce, de ce jaune lumineux qui rappelle le soleil, ce jaune juste au-dessus d’eux.
La moitié du mois d’août maintenant dépassée, on voit doucement venir la pensée de l’automne, comme une main posée sur la poignée de la porte, quelques feuilles déjà rousses nous disent que c’est bien ce qu’on croit, malgré la canicule, ou peut-être à cause d’elle, commencer à songer à la suite de l’histoire. Ne pas trancher ici dans cette immense querelle entre ceux qui préparent toute chose à l’avance, vivant dans le futur une partie du présent, ou ceux qui pensent quand même que c’était mieux hier et vivent dans le passé une partie de leur vie. Juste au sein du récit, placer quelques indices, des détails tout petits que l’on remarque à peine, mais qui aident à la fin à ne pas voir la fin comme un cheveu sur la soupe.
Ces premières feuilles jaunes, s’en réjouir ou pas, signes du temps qui passe, sagesse ou bien vieillesse, elles sont là, voilà tout. Les fruits, sur beaucoup d’arbres ne sont pas encore prêts à se laisser tomber dans nos pots de confiture, nos tartes, nos compotiers, on aimerait les voir prendre un peu plus de volume, de rondeur, de ce potelé joufflu qu’on prête aux nouveau-nés comme signe de belle santé. Flétris avant d’être mûrs, avant que les pépins, noyaux et autres graines n’aient pu se pomponner pour s’en aller germer dans une prochaine saison, c’est le lot de beaucoup en ces jours de trop chaud qui nous ont fait sauter tout un tas de chapitres, nous livrent la conclusion de la saison d’été sans qu’on ait eu le temps de savourer le style, l’écriture et la phrase avant le dénouement

Début de mi-août 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Chaud cette semaine, pas juste le chaud de l’été, mais le chaud du trop chaud. Alors, scruter le ciel pour y voir des nuages, revenir aux vieilles images de ce début de semaine alors qu’on n’était pas encore vraiment dans le trop bleu d’un ciel vraiment trop vide. Et y voir des nuages, leur voir une forme de vague, de déferlante, de houle, de vaguelette, de mouton. Prendre le temps de penser à cette couleur dite froide, à ce bleu tout là-haut qui aujourd’hui nous dit que la chaleur est là, tandis que ce même bleu, pour tous les mois d’hiver serait couleur de la glace ou couleur de nos doigts trop longtemps loin du feu. Alors en ce moment, penser au bleu de l’eau, le modéré de la mer dont la température est beaucoup moins encline à des sautes d’humeur, qui chauffe et refroidit, mais le fait tranquillement sans hérisser de pics nos courbes de suivi, sans affecter nos vies jusqu’à nous faire rêver, nous faire voir des mirages, des nuages dans le ciel alors qu’il n’y en a pas.
Aucun espoir de pluie du côté des nuées, alors baisser les yeux pour ne pas être éblouis et chercher un peu d’ombre, un peu de vent aussi. L’ombre de loin la plus douce reste bien celle des arbres, le couvert des forêts qui nous offrent leur sombre sans qu’on soit obligés d’une quelconque façon ni de les arroser ni de les bichonner comme nos plantes de jardin, juste les laisser faire, eux qui savent mieux que nous manier le froid, le chaud, l’eau et le manque d’eau tant que ça reste, quand même, de l’ordre du raisonnable.
De l’ombre on en aura aussi à l’abri des cailloux, des falaises, des rochers, des hauts et bas du sol à l’état naturel, exempt de nivelage, de nos idées de faire plat, obsession, fixation quand il s’agit d’enlever tout ce qui peut faire obstacle à nos lourdes mécaniques. À regarder les pierres avec plus d’attention au lieu de ne penser qu’à en faire du gravier, on trouverait des plantes, des bêtes, des paysages, des prototypes d’insectes encore plus fantastiques que ceux que l’on connait, on plongerait dans leurs mondes comme la mouche dans la fleur. Mais pour qui n’a pas de pierres pour y voir ces histoires, manque un peu d’habitude pour se laisser porter par l’imagination quand le temps est venu de juste faire la planche en attendant le frais, il reste tous les livres qui nous emmènent ailleurs, alors juste décaler nos horaires de travail et puis se concentrer, pour le milieu du jour un peu trop éloigné des périodes plus fraiches du matin et du soir, du coucher du soleil, juste ouvrir un livre et plonger dans les mots

Surface

Nuages ou les yeux dans les cieux, pour préciser qu’ici on parlera de nuages, de ce qu’ils nous envoient, de ce qu’ils nous renvoient. Aussi de temps en temps, un peu d’Alfred Stieglitz, au fil des découvertes, parce que ses photos m’ont poussée jusqu’aux mots à regarder là haut 
Photo © Régis Derimay

Surface. Vue d’ici ou de là, elle ne sera pas la même. La surface de l’eau vue de dessous la vague pourrait sûrement ressembler à l’image ci-dessus. La surface de notre air, de l’air que nous respirons, celui dans lequel on vit serait notre surface, les oiseaux, ses poissons ; les avions, ses surfeurs.
La surface nous indique le dedans, le dehors, le dessus, le dessous, le devant le derrière. Ou bien tout le contraire suivant là d’où l’on voit.
Surface en interface, contact entre deux mondes, celui de l’eau et de l’huile ou de l’eau et de l’air, de l’eau et de l’écume, de l’air et des nuages. Une surface toute en courbes, toute en ondulations, en bourgeons sur les branches juste avant le printemps, en cime de forêt regardée de dessus sans le détail des feuilles, en douceur arrondies comme on passerait la main sur les hautes herbes jaunes à la fin de l’été.
Surfaces en bulles, ébullition, frémissement, le levain dans son pot avant de faire le pain, les pommes dans leur cageot, fermentations diverses, champignons bien serrés par les automnes chanceux, les nuages nous emmènent, essaim de montgolfières, dans des mondes lointains ou très proches ou fictifs, des mondes imaginaires que l’on ne peut atteindre qu’en tirant sur le fil de la réalité jusqu’à le rendre si fin qu’on ne le verra plus. Parfois c’est la technique et surtout son histoire qui nous donne un coup de main pour savoir qui est qui du réel ou de ce qui n’en serait pas vraiment. La photo sous-marine était certes inventée au temps d’Alfred Stieglitz, mais elle restait encore des plus confidentielles. Donc pour ces photos-là, notre imagination peut se contenter de l’air sans ajouter de l’eau à ses pensées possibles. Si dans les deux séries, Songs ou Equivalents était une telle photo, ce serait celle d’une vague vue depuis le dessus et non vue depuis l’eau. Ou une photo de nuages. Qui sait ? D’ailleurs, qui veut savoir ?
Une surface est toujours un endroit de contact entre milieux différents. Au lieu de faire la planche à la surface des choses, aller voir juste au bord, aller voir jusqu’au bord, jusqu’à former une bulle qui ira voir là-bas, découvrir autre chose, prendre le risque d’autrui, connaître un autre monde pour enrichir le sien comme on met dans ses mots, les mots de quelqu’un d’autre, comme des petites herbes dans nos vertes salades

Début août 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Pendant toute cette semaine, le temps était changeant. Un peu de frais, un peu de pluie et aussi du soleil et son presque trop chaud. Retrouver le matin, les manches sur les bras et les mains dans les poches pour qu’elles reprennent couleur. Aller voir au jardin, voir le jaune éclatant des larges fleurs de courgettes, plus grosses que la courgette qui grandit dans leur ombre et que l’on sent déjà encore un peu croquante nous finir sous la dent avec une pointe d’ail et les petites herbes qui grandissent pas trop loin : bien sûr de l’origan et puis du serpolet qui fleurit si violet qu’on ne peut s’empêcher d’en mettre une branche de plus. Pour terminer le repas, une petite salade avant qu’elles ne veuillent prendre des airs de grande dame, qui vous regarderait d’un petit sourire en coin, une fleur de bien trop haute, pour vous dire qu’une fois de plus, la planification a eu quelques manqués. Dessert juste au-dessus avec les premières prunes, petites merveilles sans nom de l’arbre rescapé du trop de neige d’un coup qui a tant abimé de ces fragiles pruniers.
Entre deux coups de fourchette, jeter un œil dehors, apprécier comme il faut les nuages qui jouent sur les pentes d’en face, cache-cache et toboggan, aidés par la lumière qui les fait blancs ou gris, aimables ou menaçants, duveteux ou trop sombres. Hésiter à sortir, avec ou sans la veste, y regarder encore et finir par rester, debout devant la fenêtre à les regarder jouer avec nos souvenirs, nos envies de voyage, des nuages qui pourraient être d’un autre continent comme d’une autre vallée tant ils nous laissent peu de repères visibles pour pouvoir à coup sûr affirmer haut et fort où nos pieds sont vraiment. Dépaysement tranquille, juste se laisser faire, se laisser embarquer.
Pour la suite du voyage, aller voir chez les arbres qui vous diront le temps tout autant que le temps. Le temps de la météo, avec les feuilles dodues, toutes rebondies d’humide, ou bord recroquevillé quand les averses ne sont que des souvenirs lointains. Temps du calendrier par les couleurs qui vont doucement vers le jaune quand le vert perd son bleu. L’automne est encore loin, mais août c’est le début de la fin pour les feuilles. En attendant, quand même, nous restent à admirer les graines des orties, les fruits qui prennent confiance, quittent le vert enfantin pour des teintes dans les rouges, les jaunes, les violets et les bruns qui disent les caractères, les accents spécifiques. Un peu comme lire une langue ne donnera pas le même son quand on change de région, dire pommier ne donnera pas la couleur de la peau, la forme et puis la taille et encore moins le goût, l’acide ou le sucré, voire la pointe d’amertume du fruit qu’il a nourri tout en étant pommier comme tous les autres pommiers. Alors attendre encore, en surveillant de près pour connaître les voix des fruits qui s’arrondissent en apprenant leur texte