Tous les articles par Juliette Derimay

20220202

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Neige cette nuit, les températures remontent en journée, se font positives, couvert le matin et belles éclaircies l’après-midi.

Quelques flocons ce matin, une petite couche de blanc pour ranimer le vif terni de la neige sur laquelle s’est déposé le temps. La chaleur du jour fait fondre les flocons, ils perdent leurs étoiles, ils se transforment en eau. Plus froid ils se seraient unis auraient formé de la glace. Indéfinie, faite de définis. Parfois les éléments définis font un tout défini, comme les arbres font une forêt. Mais pas pour l’eau, qu’elle soit solide ou liquide, la société de l’eau est une société sans individus à nouveau repérables, on ne sépare pas la neige pour retrouver les flocons. Alors que le processus est réversible pour une langue formée de phrases, une phrase formée de mots, pour garder les avantages du groupe comme les unicités de l’individu. J’aime cette capacités des mots à vivre seuls autant qu’à exister en groupe, tout en faisant pleinement sens dans un cas comme dans l’autre. Comme les arbres

20220201

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Nuageux, température autour de zéro.

Nuages du matin, on est sûrs de rien. On est sur la crête, sur le fil de l’incertitude quant au reste de la journée : brume ou bleu ? Beau temps ou grisaille bien fraîche ? Pluie même peut-être. Ou neige en fonction de la température. Vent ?
Un matin nuageux est un carrefour, un rond point, un couloir garni de portes encore fermées.
Ensuite il fera beau ou gris ou pluvieux, la météo sera comme un film dont on ne saurait rien, une salle de cinéma où on enterait au hasard avec l’envie de se laisser surprendre qui chatouille, qui nous aide à rester flexible, à entretenir nos capacités d’adaptation, celles qui nous font humains et que l’on délaisse tant

20220128

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Beau temps, froid, au creux des vallées, possibles mers de nuages

Dans cette mer là on ne nage pas. On peut juste y voler quand on a plumes et ailes mais elle n’abritera jamais ni poisson ni baleines et ne bercera pas les coques des bateaux. Elle va vient disparaît. Elle n’en fait qu’à sa tête. Faussement vêtue de doux elle enveloppe de froid et recouvre de givre ceux qui sont sous sa coupe. Mais pourtant vue d’en haut elle a tout de la mer, le mystère du caché et le mouvement des vagues. Et parfois même une île quand un bout de cailloux vient troubler sa surface qui s’agite sous le vent. Au fond de cette mer-la il n’y a pas de coraux. Quelques épaves bien sûr mais comme partout ailleurs. Vue d’en haut elle est voile qui cacherait la mariée, vue d’en bas elle est brume féerique qui vous entoure de contes. Fascination toujours pour la où on n’est pas

Carnets de « Voyage en Irréel » #6

Il était une fois... Dans cette série "carnets", toute l'histoire de "Voyage en Irréel", livre écrit à quatre mains avec Nicolas-Orillard-Demaire. Depuis avant l'idée jusqu'à après l'objet !

Le travail sur les images

Jusqu’à maintenant, dans ces carnets, je n’ai quasiment parlé que d’écriture. Facile, c’est moi qui écris les textes et qui écris également ces réflexions sur le livre. Trop facile. Ne parler que de l’écriture, c’est occulter la moitié du travail. Les images, c’est la partie de Nicolas et pour parler d’images, il faudrait donc que je me mette dans sa peau. Facile, me direz-vous ici aussi, puisqu’il est plus grand que moi. Mais justement, une fois que je me serais mise dans sa peau, il resterait plein de place, plein de vides, des façons de voir, de ressentir et de travailler, des envies, des connaissances, des habitudes de travail, des références, …

 Donc je lui ai posé des questions. Et il a répondu.

– Quels sont tes critères pour retenir une image ou non ? 

Pour ce livre, le critère numéro un était « l’irréel ». Il fallait que le lecteur/spectateur puisse se perdre, ne pas identifier, ne pas savoir où il se trouve. 

La perte de repère était d’importance dans le choix des images.

L’autre critère était le coté paysage. Mettre des animaux aurait apporté trop de réalité, de palpable.

Il fallait aussi que ça puisse te parler à toi, parce que sans tes textes, pas de livre. Pas de collaboration, cela aurait été contreproductif.

D’ailleurs ça a marché, puisque certaines images m’ont donné trop d’idées : j’ai parfois écrit plusieurs textes pour une même photo, jusqu’à cinq textes complètement différents, sans parler des versions successives, puisque tous les textes ont évolué, parfois énormément, avec en tête, chez moi aussi, essayer que ça puisse te parler et être compatible avec ton univers.  

– Qu’est-ce que tu utilises pour retoucher/développer ?

Le développement s’effectue exclusivement avec Lightroom.

C’est une habitude de travail depuis mes débuts en photographie. Ce programme me sert aussi bien pour développer que pour classer/ranger l’ensemble de mes photographies depuis plus de dix ans.

Dans livre il y a une image en noir et blanc. Quand tu passes des images en noir et blanc, dans quel but le fais-tu ?

Pour commencer, une image en noir et blanc, ça se réfléchi dès la prise de vue. Transformer une image couleur en noir et blanc sans y penser préalablement, c’est une erreur en soi.

Le graphisme, la matière, les formes et les contrastes sont très importants dans le noir et blanc, il est logique d’y penser déjà sur la scène en couleurs …

Dans le livre il y a aussi bien des images de détails que des vues avec un angle beaucoup plus large. Comment choisis-tu la focale que tu vas utiliser et quel effet souhaites-tu obtenir dans chacun des cas (grand angle ou télé) ?

C’est un choix de l’instant, comme il y a peu de recadrage, la focale va être déterminée par l’endroit du paysage que mon œil veut mettre en valeur. Il s’agit parfois d’un sujet lointain qui nécessitera un 500mm ou un plan très large au 16. La grande focale permet souvent d’éliminer tout contexte là où le grand angle permettra au spectateur de trouver son chemin dans l’image.

Et la pose longue, pourquoi, comment ? Qu’est-ce que ça apporte à l’image ?

La pose longue c’est un paradoxe de photographe de Nature. 

On montre une réalité que les yeux ne peuvent voir. C’est une technique particulièrement adaptée au thème…

– Une réalité que les yeux ne peuvent voir, c’est à dire ?

La pose longue est une technique qui prend une photographie dans un temps donné qui peut être …très long.

La lumière entrante créée alors une moyenne sur tous les éléments en mouvements (l’eau, les nuages, les branches…) retranscrivant à l’image des choses que l’œil seul ne pourrait voir sur place.

– En quoi consiste le développement, quels paramètres tu changes et lesquels tu te refuses à toucher ? 

Le développement c’est vaste. 

Si certaines photographies ne nécessitent quasiment rien, d’autres en revanche sont le fruit d’une grosse réflexion, d’un travail artistique parfois, d’une recherche.

Sans rentrer dans les détails techniques, j’essaie dans l’absolu de me rapprocher de ce que mes yeux ont vu, ou ont voulu voir. 

Je ne change pas les couleurs et n’enlève ni ne rajoute rien aux images. 

Pour les paysages, je recarde le moins possible. Il y a des exceptions mais dans la majorité des cas, c’est la prise de vue d’origine et non un recadrage.

– Quel est ton objectif quand tu développes, dans quel but ?

Me rapprocher de ce que j’ai vu.

Approcher aussi ma vision artistique de ce moment.

– Quels sont tes principes de base et dans quel ordre tu fais les choses ?

Aucun.

En réalité certaines images dorment sur mon ordinateur pendant des années même avant d’arriver à maturité dans mon esprit.

Il n’y a pas d’ordre, pas de règle.

La seule règle que je m’applique est de transformer les beautés du monde en souvenirs.

– Quels sont tes critères pour dire que l’image est bonne et que tu arrêtes d’y toucher ? 

Une bonne image à mon sens est une image simple, épurée, lisible au premier regard, et qui suscite l’émotion. 

Sans émotion, il n’y a pas de photographie.

« Sans émotion il n’y a pas de photographie ». Pas mieux pour le mot de la fin !

Rappels :

Pour d’autres images de Nicolas : http://nod-photography.com

Et pour commander le livre « Voyage en Irréel » : https://spoteditions.sumup.link

20220123

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Beau temps, froid, quelques passages nuageux. Pas de précipitations

Des nuages, petits et timides, épars. Ils attirent l’œil après des jours de bleu uniforme. Effilochés ou rondouillards, piles d’assiettes pour menus fabuleux, chevelure de trolls hirsutes, souffle glacé d’un géant assoupi, posés sur les montagnes ou bien plus loin au large, encore sombres ou déjà éclairés par le soleil pour nous encore caché, ils annoncent le retour du mystère, des questions, des rêveries, des objets qu’on y voit, des visages qui y naissent, des histoires qu’on y lit. Des rencontres. Du non-divisé en « oui ou non » qui laisse place au débat, aux envies, aux contes et aux légendes, aux mondes plus grands que le nôtre.

20220116

"De temps en temps", ça commence par la météo, et ça continue avec ce qui vient en tirant sur le fil

Soleil, froid, l’anticyclone se sent bien, il reste.

Il était là, posé sur la rambarde, un petit rouge-gorge, les plumes gonflées sur ses pattes frêles. Le temps de la photo, il était parti, mais en fermant les yeux, vous le verrez vous aussi, comme je le revois maintenant.
Un petit rouge-gorge, curieux , frileux ? Les deux ? Embêté par la neige, surement. Pas par le silence de la neige qui se dépose sans ploc, mais par le poids de la neige, sa couverture, sa chape, sa recouverture de tout. Un flocon, deux, trois, quatre flocons… Une vague idée de l’infini. Les flocons séparés qui s’unissent, se font glace, un seul bloc, du discret au continu. La neige est mathématique, et c’est enivrant pour un petit rouge-gorge qui a chanté tout l’été.

20220113

Très beau, très froid, la neige ne fond pas.
Elle pourra faire penser à une grosse couette moelleuse, chaude, blanche, confortable. Un nid. Des plumes. Un édredon, un duvet en duvet. Fourrure épaisse et moelleuse. La neige recouvre, elle comble les failles, arrondi les arêtes, émousse les pics, recouvre pareillement une décharge ou une pelouse impeccable. Hiberner en ours polaire, faire la marmotte tout l’hiver… tentant non ?
Mais ce serait oublier le froid qui écrase et le poids qui alourdit jusqu’à l’avalanche les ailes de l’oiseau
Beauté perverse du paradis blanc.

20220109

Dans le noir et blanc il y a du noir et il y a du blanc. Des mélanges des deux aussi pour les nuances. Du gris, gris clair, gris foncé, sombre, presque blanc… Mais qu’on ne garde que les intermédiaires et on tombe dans le fade, le tiède, le compromis, le blafard, le glauque. Les conséquences sans les causes. L’ennui. Manquent le lumineux, et l’obscure, les contrastes, les limites, les hauts et les bas.
L’intense.

20220106

La neige posée sur les chemins sombres et sur les branches larges a fondu. Sur les larges branches, le blanc résiste encore, tourné vers le haut, vers le sommet de la montagne, vers les nuages porteurs de blanc. Sur le versant d’en face on ne voit pas les branches, on ne voit même pas l’arbre, ne reste que la forêt groupe devenu individu. En haut le blanc, en bas le noir, entre, la limite pluie neige. On voit cette ligne se faufiler, hésiter, zigzaguer, cette ligne du sombre au clair qui fait se transformer la gouttelette en flocon. Ou le flocon en gouttelette. Elle barre le paysage, tableau en devenir, pause du peintre au milieu du travail. Demain dira la suite. Plus blanc ? Plus sombre ? C’est le haut qui garde le blanc le plus longtemps, le blanc de la robe de mariée ou celui du linceul, c’est selon, selon ce que chacun écrira sur sa feuille blanche.