Nuit

Pour ne pas oublier tout ce qu’on oublie toujours, toujours un peu trop vite

Lorsque la nuit commence, tout est en négatif. On n’y voit plus que goutte, nos yeux, si forts de jour pour toutes les couleurs, ne distinguent plus très bien les détails et les teintes. Quand le soir se fait nuit, il fait noir, il fait sombre, et souvent il fait froid. Lorsque la nuit commence, elle est impersonnelle. Il fait noir comme il pleut, on ne connaît pas ce il qui dérobe tant de choses à nos yeux trop humains. Et puis ce soir de mai on n’a plus l’habitude, du froid et puis du noir quand les journées rallongent. Il faut monter là-haut loin des iris en fleurs pour se trouver encore les deux pieds dans la neige, une vieille neige de printemps, une neige en gravillons, en sucre peu raffiné bien loin de la poudreuse des jours froids de l’hiver. L’air est un peu trop frais pour avoir des odeurs juste le bruit de nos pas qui écrasent un peu plus cette glace déjà pilée. Alors on s’habille bien, grosse veste et bonnet comme il y a quelques mois et on avance pour voir. Et puis on ne voit rien. On plisse pourtant les yeux comme les jours de grand beau quand le ciel est trop blanc, mais ça n’aide pas vraiment. Le soutien vient du temps, les étoiles ne se livrent qu’à ceux qui sont patients. Au début on ne voit que les étoiles en gras, les étoiles majuscules, lumineuses et célèbres, celles qui se sont fait un nom qu’on aura entendu même sans s’intéresser à ces signes de là-haut qui nous disent l’infini, qui nous disent que nous sommes infiniment petits. Et puis l’œil s’habitue, il devient plus sensible, il distingue mieux et plus, des étoiles plus petites qui font les galaxies, nébuleuses, Voie lactée, des dessins en dentelle qui racontent des histoires de contes merveilleux et de mythologies, de monstres et de dieux, d’une reine insolente qui finis W, d’animaux fantastiques, de légendes terribles. Alors on reste là en oubliant le froid, on recherche l’étoile pour compléter la lyre ou on pointe du doigt pour se persuader qu’on a enfin trouvé la tête manquante du cygne. Quand la fatigue arrive qu’il est temps rentrer, on se rend compte qu’on y voit déjà bien mieux qu’avant, que ce qui était noir a pris la forme d’un arbre, qu’on retrouve les sommets et qu’on fuit la lumière pour ne pas perdre tout ça. Même les yeux pleins de sables, on fait un peu traîner comme quand il faut sortir d’une grande bibliothèque où chaque dos de livre, comme une petite lumière, est une promesse d’histoire

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