Archives de catégorie : Blog

Mi-août 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Semaine de chaleur, de forte chaleur, de canicule. Le grand chaud excessif, tout comme son opposé, le grand froid excessif, nous pousse à l’intérieur, nous pousse à nous cacher, nous camoufler, nous soustraire au-dehors, à laisser seuls au loin ceux qui ne peuvent se mouvoir pour aller chercher l’ombre. Les arbres sont de ceux-là, plantés, comme toutes les plantes et qui ne peuvent quitter le lieu de leurs racines. Eux qui nous font de l’ombre ne peuvent en profiter que venant de leurs aînés, qui eux sont condamnés à rester tête nue sous le soleil de plomb. Pour certains cette épreuve a hâté la venue du jaunissement des feuilles. Beaucoup ont sur la tête, en fonction de leur espèce, de ce jaune lumineux qui rappelle le soleil, ce jaune juste au-dessus d’eux.
La moitié du mois d’août maintenant dépassée, on voit doucement venir la pensée de l’automne, comme une main posée sur la poignée de la porte, quelques feuilles déjà rousses nous disent que c’est bien ce qu’on croit, malgré la canicule, ou peut-être à cause d’elle, commencer à songer à la suite de l’histoire. Ne pas trancher ici dans cette immense querelle entre ceux qui préparent toute chose à l’avance, vivant dans le futur une partie du présent, ou ceux qui pensent quand même que c’était mieux hier et vivent dans le passé une partie de leur vie. Juste au sein du récit, placer quelques indices, des détails tout petits que l’on remarque à peine, mais qui aident à la fin à ne pas voir la fin comme un cheveu sur la soupe.
Ces premières feuilles jaunes, s’en réjouir ou pas, signes du temps qui passe, sagesse ou bien vieillesse, elles sont là, voilà tout. Les fruits, sur beaucoup d’arbres ne sont pas encore prêts à se laisser tomber dans nos pots de confiture, nos tartes, nos compotiers, on aimerait les voir prendre un peu plus de volume, de rondeur, de ce potelé joufflu qu’on prête aux nouveau-nés comme signe de belle santé. Flétris avant d’être mûrs, avant que les pépins, noyaux et autres graines n’aient pu se pomponner pour s’en aller germer dans une prochaine saison, c’est le lot de beaucoup en ces jours de trop chaud qui nous ont fait sauter tout un tas de chapitres, nous livrent la conclusion de la saison d’été sans qu’on ait eu le temps de savourer le style, l’écriture et la phrase avant le dénouement

Début de mi-août 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Chaud cette semaine, pas juste le chaud de l’été, mais le chaud du trop chaud. Alors, scruter le ciel pour y voir des nuages, revenir aux vieilles images de ce début de semaine alors qu’on n’était pas encore vraiment dans le trop bleu d’un ciel vraiment trop vide. Et y voir des nuages, leur voir une forme de vague, de déferlante, de houle, de vaguelette, de mouton. Prendre le temps de penser à cette couleur dite froide, à ce bleu tout là-haut qui aujourd’hui nous dit que la chaleur est là, tandis que ce même bleu, pour tous les mois d’hiver serait couleur de la glace ou couleur de nos doigts trop longtemps loin du feu. Alors en ce moment, penser au bleu de l’eau, le modéré de la mer dont la température est beaucoup moins encline à des sautes d’humeur, qui chauffe et refroidit, mais le fait tranquillement sans hérisser de pics nos courbes de suivi, sans affecter nos vies jusqu’à nous faire rêver, nous faire voir des mirages, des nuages dans le ciel alors qu’il n’y en a pas.
Aucun espoir de pluie du côté des nuées, alors baisser les yeux pour ne pas être éblouis et chercher un peu d’ombre, un peu de vent aussi. L’ombre de loin la plus douce reste bien celle des arbres, le couvert des forêts qui nous offrent leur sombre sans qu’on soit obligés d’une quelconque façon ni de les arroser ni de les bichonner comme nos plantes de jardin, juste les laisser faire, eux qui savent mieux que nous manier le froid, le chaud, l’eau et le manque d’eau tant que ça reste, quand même, de l’ordre du raisonnable.
De l’ombre on en aura aussi à l’abri des cailloux, des falaises, des rochers, des hauts et bas du sol à l’état naturel, exempt de nivelage, de nos idées de faire plat, obsession, fixation quand il s’agit d’enlever tout ce qui peut faire obstacle à nos lourdes mécaniques. À regarder les pierres avec plus d’attention au lieu de ne penser qu’à en faire du gravier, on trouverait des plantes, des bêtes, des paysages, des prototypes d’insectes encore plus fantastiques que ceux que l’on connait, on plongerait dans leurs mondes comme la mouche dans la fleur. Mais pour qui n’a pas de pierres pour y voir ces histoires, manque un peu d’habitude pour se laisser porter par l’imagination quand le temps est venu de juste faire la planche en attendant le frais, il reste tous les livres qui nous emmènent ailleurs, alors juste décaler nos horaires de travail et puis se concentrer, pour le milieu du jour un peu trop éloigné des périodes plus fraiches du matin et du soir, du coucher du soleil, juste ouvrir un livre et plonger dans les mots

Surface

Nuages ou les yeux dans les cieux, pour préciser qu’ici on parlera de nuages, de ce qu’ils nous envoient, de ce qu’ils nous renvoient. Aussi de temps en temps, un peu d’Alfred Stieglitz, au fil des découvertes, parce que ses photos m’ont poussée jusqu’aux mots à regarder là haut 
Photo © Régis Derimay

Surface. Vue d’ici ou de là, elle ne sera pas la même. La surface de l’eau vue de dessous la vague pourrait sûrement ressembler à l’image ci-dessus. La surface de notre air, de l’air que nous respirons, celui dans lequel on vit serait notre surface, les oiseaux, ses poissons ; les avions, ses surfeurs.
La surface nous indique le dedans, le dehors, le dessus, le dessous, le devant le derrière. Ou bien tout le contraire suivant là d’où l’on voit.
Surface en interface, contact entre deux mondes, celui de l’eau et de l’huile ou de l’eau et de l’air, de l’eau et de l’écume, de l’air et des nuages. Une surface toute en courbes, toute en ondulations, en bourgeons sur les branches juste avant le printemps, en cime de forêt regardée de dessus sans le détail des feuilles, en douceur arrondies comme on passerait la main sur les hautes herbes jaunes à la fin de l’été.
Surfaces en bulles, ébullition, frémissement, le levain dans son pot avant de faire le pain, les pommes dans leur cageot, fermentations diverses, champignons bien serrés par les automnes chanceux, les nuages nous emmènent, essaim de montgolfières, dans des mondes lointains ou très proches ou fictifs, des mondes imaginaires que l’on ne peut atteindre qu’en tirant sur le fil de la réalité jusqu’à le rendre si fin qu’on ne le verra plus. Parfois c’est la technique et surtout son histoire qui nous donne un coup de main pour savoir qui est qui du réel ou de ce qui n’en serait pas vraiment. La photo sous-marine était certes inventée au temps d’Alfred Stieglitz, mais elle restait encore des plus confidentielles. Donc pour ces photos-là, notre imagination peut se contenter de l’air sans ajouter de l’eau à ses pensées possibles. Si dans les deux séries, Songs ou Equivalents était une telle photo, ce serait celle d’une vague vue depuis le dessus et non vue depuis l’eau. Ou une photo de nuages. Qui sait ? D’ailleurs, qui veut savoir ?
Une surface est toujours un endroit de contact entre milieux différents. Au lieu de faire la planche à la surface des choses, aller voir juste au bord, aller voir jusqu’au bord, jusqu’à former une bulle qui ira voir là-bas, découvrir autre chose, prendre le risque d’autrui, connaître un autre monde pour enrichir le sien comme on met dans ses mots, les mots de quelqu’un d’autre, comme des petites herbes dans nos vertes salades

Début août 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Pendant toute cette semaine, le temps était changeant. Un peu de frais, un peu de pluie et aussi du soleil et son presque trop chaud. Retrouver le matin, les manches sur les bras et les mains dans les poches pour qu’elles reprennent couleur. Aller voir au jardin, voir le jaune éclatant des larges fleurs de courgettes, plus grosses que la courgette qui grandit dans leur ombre et que l’on sent déjà encore un peu croquante nous finir sous la dent avec une pointe d’ail et les petites herbes qui grandissent pas trop loin : bien sûr de l’origan et puis du serpolet qui fleurit si violet qu’on ne peut s’empêcher d’en mettre une branche de plus. Pour terminer le repas, une petite salade avant qu’elles ne veuillent prendre des airs de grande dame, qui vous regarderait d’un petit sourire en coin, une fleur de bien trop haute, pour vous dire qu’une fois de plus, la planification a eu quelques manqués. Dessert juste au-dessus avec les premières prunes, petites merveilles sans nom de l’arbre rescapé du trop de neige d’un coup qui a tant abimé de ces fragiles pruniers.
Entre deux coups de fourchette, jeter un œil dehors, apprécier comme il faut les nuages qui jouent sur les pentes d’en face, cache-cache et toboggan, aidés par la lumière qui les fait blancs ou gris, aimables ou menaçants, duveteux ou trop sombres. Hésiter à sortir, avec ou sans la veste, y regarder encore et finir par rester, debout devant la fenêtre à les regarder jouer avec nos souvenirs, nos envies de voyage, des nuages qui pourraient être d’un autre continent comme d’une autre vallée tant ils nous laissent peu de repères visibles pour pouvoir à coup sûr affirmer haut et fort où nos pieds sont vraiment. Dépaysement tranquille, juste se laisser faire, se laisser embarquer.
Pour la suite du voyage, aller voir chez les arbres qui vous diront le temps tout autant que le temps. Le temps de la météo, avec les feuilles dodues, toutes rebondies d’humide, ou bord recroquevillé quand les averses ne sont que des souvenirs lointains. Temps du calendrier par les couleurs qui vont doucement vers le jaune quand le vert perd son bleu. L’automne est encore loin, mais août c’est le début de la fin pour les feuilles. En attendant, quand même, nous restent à admirer les graines des orties, les fruits qui prennent confiance, quittent le vert enfantin pour des teintes dans les rouges, les jaunes, les violets et les bruns qui disent les caractères, les accents spécifiques. Un peu comme lire une langue ne donnera pas le même son quand on change de région, dire pommier ne donnera pas la couleur de la peau, la forme et puis la taille et encore moins le goût, l’acide ou le sucré, voire la pointe d’amertume du fruit qu’il a nourri tout en étant pommier comme tous les autres pommiers. Alors attendre encore, en surveillant de près pour connaître les voix des fruits qui s’arrondissent en apprenant leur texte

Fin juillet 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Fin juillet, le milieu de l’été. Juillet ce serait un peu comme l’acclimatation, se faire à la chaleur et aux soirées plus longues qui permettent de tirer un peu sur la journée, d’aller encore le soir, après avoir mangé, faire une petite balade ou gratter dans le jardin si jamais les moustiques ne se mêlent pas trop de tout ça. Le juillet des végétaux c’est avoir tout en place, l’ombre douce sous les arbres, les feuilles qui se fortifient, épaississent leurs fibres en tirant du soleil tout ce qu’elles peuvent attraper, magie de la chlorophylle, précieux panneaux solaires qui créent de la matière. Fin juillet cette année c’est du frais agréable, avec du chaud sans trop et de l’eau pour donner assurance et volume à tous les végétaux.
Du côté végétal, ça murit et grossit, ça se colore aussi ou ça prend du piquant si on est né châtaigne. Autres arbres, autres feuilles, les prunes affirment chacune une couleur ou une forme quand les feuilles restent discrètes avec leurs différences. Maintenant chacun affine la forme de ses fruits, les pommes prennent de la rondeur et même pour certaines, du rosé sur les joues. Quand on part en balade c’est régal assuré, mûres, myrtilles ou framboises, voire encore quelques-unes des petites fraises des bois, les choisir avec soin pour éviter l’acide, les papilles guident la main qui laissera sur la branche le fruit pas encore prêt à quitter sans regret sa plante nourricière.
Du côté animal pour moi l’été est de loin la saison des insectes. Se baisser pour les voir, regarder au plus près pour pouvoir s’extasier sur la finesse des pattes, la transparence des ailes ou encore le solide de leurs fortes carapaces. Ils ont aussi pour eux une ingéniosité et une force de groupe qui est apte à détruire toutes les forteresses que l’on croyait imprenables. Leur force et leur faiblesse reste leur petite taille, vulnérabilité face aux becs affamés des oisillons juste nés que les parents nourrissent avec le plus grand zèle. Mais tout ça se passe, bien sûr, dans un monde idéal, quand nous autres humains n’avons pas décidé de les éliminer avec des armes chimiques, sûrement un peu jaloux de leur esprit d’équipe.
Souvent la météo mettra tout le monde d’accord, les orages du soir font rentrer tout ce qui bouge aux terriers respectifs, avec côté humain quand même un avantage qui lui permet de voir à travers ses fenêtres les nuages faire leur show, nous cacher les montagnes comme les parents apprennent au tout petit bébé que Sophie la girafe ou l’adoré doudou existe encore même quand il ne le voit plus

Fin de mi-juillet 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Orages et averses d’été, de ces pluies qu’on attend pour rafraichir le soir et parce qu’elles sont logiques dans le cycle des jours et puis celui de l’eau. Traits, points, toujours clairs et brillants sur le fond sombre des arbres, le langage des coulées, des mots à déchiffrer dans une autre écriture, celle des petites gouttes rondes et puis des gouttes longues, le morse de la pluie. Une autre façon de dire, de parler des nuages, elles disent d’où elles viennent, disent la terre où elles tombent et ce qu’elles y feront, juste flaque ou ruisseau jusqu’à rejoindre la mer, un futur d’aventures.
Les arbres et autres plantes à quelques exceptions près sont maintenant plus tranquilles, le temps n’est plus aux fleurs, aux feuilles à construire, juste à consolider tout ce que le printemps à fait naitre de nouveau, elles sont plutôt croissance que fleurs ou bien naissance. Presque le temps de lézarder dans le beau temps d’été. Les fruits sont bien en place, les papilles se préparent au fur et à mesure que grossissent les pommes.
Il reste quand même des plantes pour grandir coûte que coûte sans prendre aucun repos, qui renaissent de plus belle quand une débroussailleuse les réduits à néant au niveau des racines, les fougères et les ronces sont de ces sortes de plantes pourvu que l’eau soit là, au moins l’humidité. Les mousses bien sûr aussi, qui se replient pour le chaud et se déploient en grand quand l’eau est de nouveau là.
Question adaptation, les plantes savent faire pourvu qu’on les laisse faire, les animaux aussi, chacun son petit royaume, son moment de la journée, quand il s’agit de voir la journée de 24 heures, avec la nuit aussi. Alors que nous humains sommes bien moins adaptés à vivre dans le noir surtout que maintenant, pleine lune ou noir complet, on allume la lumière pour que nos yeux puissent rester notre atout principal pour connaitre le monde qui est autour de nous. Alors, en profiter pour quand même ça et là, lever les yeux au ciel et éteindre les lampes pour pouvoir profiter des étoiles, de la lune et puis de toutes les ombres qui font beaucoup moins peur quand on fait un effort pour mieux faire connaissance.

Début de mi-juillet 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Début de semaine un peu comme on reprend son souffle après une longue apnée, comme on reprendrait vie. Après la canicule, enfin un peu de pluie, une pluie tranquille et douce, pas un orage violent, une vraie pluie qui mouille, même s’il faudrait quand même un peu plus que ça pour hydrater la terre souvent devenue poussière quand elle était à nu, sans aucune protection, sans couvert végétal, sans un habit de feuilles. Et avec la pluie, reviennent les douces fraicheurs. On n’est pas en hiver et fraicheur en juillet se range dans l’agréable. Le retour sur la peau des poils qui partent en guerre pour garder la chaleur, de nos cuirs qui se parent des petites montagnes de la chair de poule. Les soirées encore longues sont des moments précieux, des bouts de jour en plus, une deuxième journée plus tranquille et douillette quand celle du temps normal est déjà derrière nous. Aller se balader jusqu’à ne plus rien voir que des nuances de gris ou lire en jetant un œil, et parfois même les deux, sur le soleil qui se couche sans toutefois oublier de laisser s’attarder quelques-uns de ses rubans, volants et falbalas au milieu des nuages qui se pâment en rosissant. Alors on rentre quand même pour aller se coucher, mais la fenêtre ouverte fait de nous des indiscrets chez les chouettes hulottes qui échangent, se chamaillent et s’appellent comme si elles étaient seules.
Vers le milieu de la semaine, les nuages s’écartent, laissent la place de nouveau au ciel bleu, au soleil. Retour du soleil donc, mais un soleil décent, un soleil raisonnable qui réchauffe sans cuire. Profiter du moment pour aller en forêt sur les chemins en pente puisque les feuilles mouillées glissent certes sous la chaussure, mais moins que les feuilles très sèches qui sont plus insidieuses et glissent l’une sur l’autre pour vous faire redescendre bien plus vite que prévu.
Au cours de la balade, penser à faire une pause, sous les arbres on est bien, lumière tamisée et puis théâtre d’ombres. À défaut de bord de mer on a les bords des feuilles, on peut même, luxe du choix, élire sa météo et la forme des vagues. Calme plat chez le noyer, vaguelettes chez le hêtre, houle tranquille chez le chêne et déferlantes terribles si on se rapproche assez des bords de la longue feuille du digne châtaignier. Les feuilles ont toutes maintenant leur vert soutenu d’été, elles se sont renforcées, gainées dans de longues fibres, elles ont atteint, cette fois, leur pleine maturité. Chez les arbres on n’est plus dans le temps des naissances, on est dans la croissance, l’entretien attentif des fleurs devenues fruits, attendre patiemment que ces fruits deviennent gros, dodus, joufflus, ventrus pour que les frugivores attentifs à l’avenir puissent les déguster et jeter les noyaux, disperser les pépins pour que d’autres arbres poussent.

Début juillet 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Une semaine d’attente. Attendre que la température baisse, attendre que la pluie tombe, attendre que l’été se fasse enfin vivable et que l’on puisse sortir sans se protéger de lui, de sa lumière trop dure, de son soleil trop brulant. À chaque coup d’œil dehors, avoir une pensée, triste autant qu’attristante, pour ceux qui sont coincés, bloqués par leurs racines qui les laissent cloués là, sans espoir de mouvement, sans espoir de changement quand ils regardent, envieux, ceux du règne animal, aller se mettre à l’ombre, aller se mettre sous leur ombre.
Attendre c’est ne rien faire, mais sans l’avoir choisi, ou alors s’occuper, mais jamais complètement, avec toujours en tête qu’il vaudrait mieux faire ça, que ce serait plus urgent ou bien plus rationnel, mais on n’y arrive pas, ou juste on ne peut pas. Alors jamais à fond sur un projet ou l’autre, mais toujours en attente avec un bout de la tête braqué sur le thermomètre ou bien sur les nuages qui apparaitraient presque en mirages célestes dans un désert trop bleu.
Parfois, on reprend espoir, le temps d’un peu de vent, de deux ou trois grosses gouttes aussi vite séchées qu’elles font mine de mouiller et de quelques éclairs entre l’espoir et la crainte de la violence du ciel quand éclairs et tonnerres viennent s’allier pour nous dire que nous sommes bien mignons nous autres les humains, mais que nos constructions n’ont rien d’assez solide et que si le ciel veut, on disparaitra vite de la peau de la terre, en parasites chassés d’un simple revers d’orage.
Du côté végétal, on tient encore un peu, en attente également, arrêter la croissance, observer et attendre, parfois aller jusqu’à laisser les fruits sécher avant qu’ils ne soient mûrs, du vert passer au jaune sans avoir eu la belle, la douce, l’appétissante couleur rouge des framboises. Ce sont encore les ronces qui s’en sortent le mieux. Certes du côté des mûres, pas mieux que les framboises, mais feuilles encore vaillantes et même de nouvelles pousses, des branches qui vont chercher de l’ombre et de l’eau, jetant dans la bataille toutes les forces disponibles quand tous les autres attendent, feuilles recroquevillées, la tête dans les épaules, qu’enfin les fins nuages fassent association pour faire tomber la pluie. Du côté des humains et autres animaux qui peuvent se déplacer, le mot d’ordre pour survivre c’est profiter de l’ombre, celle du soir, du matin, surtout de l’ombre des arbres, de bien loin la meilleure, et même si j’osais dire, sans craindre l’oxymore, malgré le dramatique, l’ombre la plus chaleureuse.

Fin juin 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Tempête de ciel bleu comme disent les photographes. De retour après quelques jours loin d’ici, ce qui me frappe, c’est le jaune. Canicule, chaleurs excessives, stress hydrique, le vert que j’ai quitté semble s’être dissocié, en bas le jaune des herbes sèches, en haut le bleu trop bleu du ciel sans un nuage. Changement de référence on passe en ce mois de juin du bleu comme couleur froide au bleu de carte postale façon vacances et plage dés le début de la saison.
Les arbres résistent encore, ils dispensent une douce ombre pour qui peut se déplacer. Mais pour les végétaux pas question de bouger. Alors, rouler ses feuilles, les vider de leur eau jusqu’à les faire jaunir pour préserver la tige, la racine, la matrice pour espérer renaître à la prochaine vraie pluie. Parce qu’il faut l’avouer quelques gouttes sont tombées, mais juste pour l’anecdote, pas une vraie pluie qui mouille, tout au moins par ici. D’ailleurs de gros orages sur une terre si sèche ne sont pas à souhaiter, ils emportent et arrachent qui ne tenait qu’à peine à un fil de racine entre fissure et poussière, jetant dans les rivières déjà bien surchargées, le bébé, l’eau du bain, la plante et puis sa terre.
Alors, attendre. Cette fois pas l’embellie, mais bien le gris de la pluie et de bons gros nuages qui cacheraient le soleil.
Certaines plantes continuent le cycle commencé, on ramasse les groseilles, les cassis, les framboises qui profitent du chaud pour mûrir sans attendre d’avoir vraiment atteint le diamètre optimal. Ce qui n’empêche pas de rêver confiture, de se faire les doigts bleus et de ne plus avoir faim au moment de manger pour cause de grappillage. Du côté des oiseaux on en profite aussi de ces baies bien visibles, un peu de concurrence alors en planter plus, à l’automne c’est boutures.
En attendant l’automne profiter des moments de lumière moins forte, avant autant qu’après la présence du soleil pour aller picorer toute la délicatesse d’un pétale de lys, l’odeur et le chiffonné d’un chaton de châtaignier ou juste tremper la main dans le frais du ruisseau. Et puis quand la chaleur devient vraiment trop forte l’idéal serait bien d’aller se mettre à l’ombre sous les branches d’un grand arbre en compagnie d’un livre, pourquoi pas d’un Balzac, de la comédie humaine alors que nos horaires d’êtres humains dits modernes ignorent superbement les rythmes de chacun et ceux du temps qu’il fait

Fin de mi-juin 2025

Journal hebdomadaire de la nature autour, promenade, branche dessus, branche dessous, avec le grand dehors

Une semaine à Paris, une ville, une grande ville, très grande, mais qui se laisse parcourir à pied, quand le temps ne presse pas trop et qu’elle donne l’impression d’être encore bien plus grande, un ensemble de petits mondes, avec juste quelques artères qui relient chaque morceau avec chacun des autres. Et parmi ces morceaux, les jardins et les squares, les petits groupes et les longues lignes d’arbres qui rendent les lieux vivables même par grosses chaleurs. On se demande bien comment ils peuvent survivre, ces arbres, avec le peu de terre qu’on imagine toute mince entre le goudron des rues et le métro des sous-sols.
Des arbres bien alignés, parfois de tout jeunes arbres au milieu des anciens, on imagine alors un ancêtre décédé qui a laissé sa place. Certains de ces tout jeunes ont du mal à survivre, les feuilles déjà cassantes, le vert virant au jaune. Températures trop chaudes, pas beaucoup d’animaux, grenouilles au bord de l’eau dans un étang tranquille du côté de Saclay, mais surtout des oiseaux dans les allées des parcs. Des pigeons historiques, les toutes nouvelles perruches, pas beaucoup de moineaux et puis quelques corbeaux, bec ouvert et à l’ombre, qui souffrent comme tout le monde, mais qui limitent leurs pas et encore plus leur vol et savent parfaitement que l’enfant qui les poursuit ne pourra pas franchir, la grille qui les protège désormais du marmot.
Et puis quand même parfois lever les yeux au ciel pour y voir des nuages, des tout fins et très hauts, mais des nuages quand même, un peu de blanc dans le bleu quand on préfère aller vite se réfugier à l’ombre loin de la lumière, et surtout de la chaleur qui la suit comme son ombre.